Chère Nurith,

Je maintiens: c'est ta rigueur et ta manière d'aller chercher la vérité de ce qui tient la

passion de traduire chez l'un ou l'une, dans un montage extrêmement tendu et sobre

où l'on a en même temps la possibilité de s'en aller dans la lettre, aussi bien que

dans le fil électrique entre les feuilles qui devient du même coup signe abstrait, qui

crée l'émotion: ce qui est dit est indissociable de la manière dont tu filmes les gens

dans leurs univers qui répondent à ce qui est extrêmement préparé par toi sans que

cela ne se voit: d'où l'impression de conte infini dans l'intérieur de la langue et de

derviche tourneur, ou de pâte à pain en train de se former(les femmes, plus, alors):

l'émotion tient à une évidence qui est le fruit d'un travail, d'autant plus remarquable

qu'il ne se voit pas,en apparence- et non pas lié uniquement du tout au contenu de

ce que chacun dit: ça, c'est une vision psychologique.

Les corps, les mots et la lettre se nouent ainsi comme un alphabet qui fait alchimie

et n'a d'ailleurs aucune raison de s'arrêter, comme un puits infini où la langue

s'entremêle dans une autre, marrane ici, exilée ailleurs, et prise dans le corps de

celui ou celle qui parle de façon vivante , joyeuse, gourmande - à la fois actuelle et

intemporelle: tu nous fait sauter à cloche pied sans cesse d'une trame à l'autre, d'une

fenêtre à l'autre, sans que jamais nous ne perdions pied: bravo, Nurith!

Je t'embrasse, Sylvie